Romy ◊ Dynasty.

22/02/1895 Date de naissance attribuée au nourrisson abandonné lors de son adoption par Mr & Mrs Dirberry.
01/09/1904 9 ans, entrée à Ilvermorny, répartie au sein de la maison du Serpent Cornu.
1914 Obtention du diplôme en Artisanat Magique, elle ne se voit pas faire autre chose que ce qui fait la fierté des Dirberry depuis des années.
1915 Débute une relation toxique avec un Maj qui lui promet un tendre avenir.
1916 Rejoint l'entreprise familiale, l'héritage de Betty entre les mains de ses petites-filles comme elle l'a toujours souhaité.
1917 Tangiscopie instable, pousse le lunatisme et la créativité au paroxysme, son compagnon l'entraîne dans diverses expériences afin de tenter de réprimer ce talent, l'alcool ne provoque que sa soumission.
10/1919 Rencontre avec Aubrey Demant, par le hasard du destin. Il la ramasse sans savoir qui elle est. Au coeur de la demeure se déroulent les drames internes. Demande en mariage incongrue.
12/1919 Travaille sur de noirs sortilèges pour contenir sa haine.
01/1920 Mariage. Alliance scellée avec la lignée Demant.


Sur le carrelage blanc, les paumes rougies. Sur le marbre, la douleur infâme. Sur les joues pâles, les larmes. Sur le ventre compressé, les doigts fins. A l’instar de sa mère adoptive bien des années auparavant, elle subit les ravages terribles de la perte, de ce qui s’arrache de ses espoirs et de ses rêves. Elle n’est pas Vivienne, elle n’aura pas le courage de survivre à cela, c’est ce qui tourne dans l’esprit en souffrance tandis qu’elle s’abandonne au froid du sol de la salle de bains trop grande pour sa frêle silhouette. Elle est toujours consciente quand l’ombre la surplombe, quand la silhouette massive vient auprès d’elle, la délaissée, la recueillie. Elle ne savait pas, c’est ce qu’elle répète, murmure dans une boucle de milles excuses contre le torse. Elle ne voulait pas salir le carrelage, comme si ça avait une quelconque importance. Cet homme là, elle ne le connait pas plus qu’il ne la connait, il l’a simplement sortie des pattes infâmes d’un malotru qui ne faisait que la détruire, il l’a prise pour une prostituée quand elle n’était qu’une célébrité à la dérive intérieure, dont la réussite en affaires n’avait d’égal que son échec en amour. Elle a cette confiance déraisonnable à son égard, comme un lien invisible tissé au premier regard qui n’a pas vu son nom ou sa réputation, seulement sa détresse. Elle n’a que cela, Romy, de la détresse.  


« Tu es sûre que c’est ce que tu désires, ma chérie ? » Vivienne et Betty l’observaient avec attention. Depuis combien de temps n’avaient-elles pas vu Rosemary sourire ainsi ? Depuis combien de temps n’avait-elle pas eu l’air enfin détendue, enfin elle-même ? Elles ne sauraient même plus le dire. Vivienne savait qu’elle avait été une mère exigeante, peut-être plus qu’avec son aîné, parce qu’elle refusait que sa fille se sente privilégiée, parce qu’elle refusait de placer une différence entre ses deux enfants et il s’agissait sans doute là d’une erreur car elle avait toujours poussé les mômes à se dépasser sans réellement se rendre compte des failles que cela pouvait causer. Seul le talent compte, le sang importe peu. Betty aussi s’était montrée sévère avec ses fils, avait légué à ses trois petites-filles un lourd héritage, le poids de la Maison Dirberry sur les épaules, les valeurs d’une élégance rare et d’une image que rien ne devait froisser. Rosemary l’avait fait, elle avait causé le trouble, la rébellion, les murmures et à 25 ans, la voir se marier était un soulagement. Elle se rangeait enfin. « Tu fais une dangereuse alliance, en as-tu seulement conscience ? » Les yeux se lèvent au ciel, soulignent son agacement à être traitée telle une petite inconsciente qui n’aurait pas compris qui pouvaient être les Demant. Leur nom seul faisait écho à nombre d’idées, les diamants en premier, sombres et menaçants. « Aubrey est parfaitement à même de me protéger, Grand-mère, ne t’en fais pas. Je voudrais juste.. que vous soyez heureuses pour moi, d’accord ? » « Bien sûr, Romy. Je crains qu’il ne t’oblige, tu comprends ? » Celui qui l’avait obligée était bien différent de M. Demant, plus jeune, aux allures de gendre idéal. Aubrey ne semblait vouloir que son bien. Elle aurait voulu qu’il l’aime vraiment, elle, pour la personne qu’elle pouvait être mais en cela, Rosemary peinait à croire ; on n’espère plus après un certain nombre de déceptions. Se réparer serait long, se remettre serait laborieux, il lui fallait cacher derrière l’enthousiasme des préparatifs la perte de ce qui aurait pu causer sa disgrâce - oui, et pourtant.. le regret sur la langue, l’amertume, demeurent.


Le décor bascule. Pareil à la hauteur d’une toiture, la scène se dessine, arrache la sorcière à l’instant présent, à la caresse offerte sur l’étoffe d’une écharpe dont les motifs l’inspiraient. Le corps suspendu se balance encore légèrement, plongé dans la demi-pénombre d’un coucher de soleil. L’objet du crime, l’objet d’un acte désespéré, elle ne saurait dire.
Ca n’a duré qu’une seconde, un battement de cils tandis qu’elle repose l’accessoire. Noire idée qui se peint dans l’esprit à l’imagination parfois retorse.. et si l’on pouvait défaire des destins avec style ? Elle se mord la lèvre inférieure et c’est comme si le crayon se déplaçait sur le papier par sa seule volonté, traçant le croquis d’une tenue dont les teintes se voulaient joyeuses. Le sortilège associé, lui, n’avait que de macabres objectifs. Qui ne voudrait pas s’arracher de fiançailles grâce à un bête accident de chapeau s’affolant jusqu’à se resserrer autour du crâne, suite à l’étranglement banal d’une écharpe qui se ferait boa constrictor jusqu’à l’asphyxie contre la délicate gorge d’une maîtresse envahissante ou d’un mâle trop sûr de son charme ? Les yeux verts se détournent, un peu coupables de ces pensées. Est-ce vraiment ce qu’elle est ? Tentation. Elle voudrait voir si c’est possible. Elle voudrait voir si les problèmes peuvent s’envoler dans de la soie onéreuse ou sous la tendresse d’un velours venant corseter la victime.


« Mrs Demant, avez-vous un commentaire à faire sur le tragique accident qui a emporté ce pauvre homme ? » Rosemary peine encore à intégrer qu’elle répond désormais à ce nom, à cette nouvelle identité qui l’a liée à sa belle-famille dans un somptueux mariage quelques mois plus tôt. Être connue a le défaut de vous attirer une attention parfois malvenue, pourtant aux lèvres légèrement teintées de rouge s’accroche un sourire parfaitement commercial aux allures presque charmeuses. « La Maison Dirberry n’y peut rien si les clients un brin trop audacieux ne savent enfiler une simple écharpe, très cher. » Un clin d’oeil tandis qu’elle descend les marches menant au bâtiment qu’elle quitte non sans offrir les éternels atours de créatrice détachée du monde. Elle sait, au fond, que ce cinéma mondain lui fait du mal, qu’il a toujours causé des fissures à ce coeur qui ne saurait se montrer véritable et sincère avec les journalistes et la populace envieuse du succès. Peut-être que Romy Demant n’est pas quelqu’un de bien. Peut-être que Romy Demant joue avec le feu comme titrent certains articles, il n’empêche que les trois cousines et leur renouvellement permanent de la mode savaient jouer les équilibristes au sein du chemin sinueux de la haute société. On vend au plus offrant des secrets bien gardés. Romy, elle, ne désire de ces noires inventions qu’un résultat : donner aux victimes une sortie de secours. Elle aurait aimé, autrefois, qu’une simple veste puisse lui servir à s’extirper de la violence de cet homme qui lui avait promis monts et merveilles pour n’accorder finalement que des bleus au corps et à l’âme.
Sans Aubrey, sans doute ne se serait-elle pas essayée à de telles recherches.
Et doucement, le cygne flamboyant pare ses plumes d’encre.


✧ Tangibile qui ne s'assume que trop mal, elle a cherché longtemps à explorer puis à fuir cette nature qu'elle juge dérangeante voire honteuse. ✧ Maternité désirée, maladivement, comme sa propre mère autrefois. Elle intériorise cette réalité, refoule avec douleur, elle qui n'a pas de racines. ✧ Inventions macabres dans le sillage, parfois inspirées par les visions qu'offrent certains objets à son contact. Le diable saurait s'habiller en Dirberry, s'il savait. ✧ Anxieuse, elle subit des crises d'angoisse à force d'intérioriser ses complexes, de jouer un rôle dont elle ne veut pas vraiment, s'effondre la poupée. ✧ Factice aisance sociale, Romy se pare de l'excentricité lunatique qui libère des conventions auprès des gazettes curieuses mais s'avère tout autre dans son quotidien, sensible et attentive. ✧ Excessive, elle s'oublie dans la découverte, dans le travail par dessus tout, défaite du temps et des heures jusqu'à ce qu'on lui sorte le nez de ses croquis. ✧ Fuite laborieuse des addictions, elle a échappé aux mauvais mélanges d'alcool et de potions pour tremper les doigts dans d'obscures magies, se croyant sortie de ses terribles fragilités. ✧ La famille en vaste valeur, celle qui n'a pas connu ses origines sacrifierait le peu de morale restante pour les protéger, d'un côté comme de l'autre. ✧ Sortilège colorant fait passer la rousse pour blonde, souvent, les stratagèmes esthétiques travaillent la créatrice tirée à quatre épingles. Elle en remercie les collaborations variées avec d'autres domaines de la mode, d'ailleurs. ✧